La guerre par d’autres moyens

Dans son nouveau roman « La guerre par d’autres moyens », Karine Tuil aborde tout un tas de sujets, avec pour point de départ la façon dont  évolue la vie d’un couple formé par un Président, Dan Lehman, et par sa seconde épouse Hilda Muller, actrice, alors qu’il n’a pas été réélu…Mais bien que s’intéressant au pourquoi de la non réélection du Président sortant et la façon dont il pourrait rebondir en dehors de la politique, l’autrice se tourne bien davantage vers une analyse sans concession des milieux du cinéma, de la littérature et de la condition féminine dans une société toujours patriarcale . Pourquoi ? Parce la première épouse de Lehman, Marianne, a dû mettre en sourdine son talent de romancière durant la vie politique de son mari, et que Hilda, la seconde, pour les mêmes raisons, s’est éloignée des plateaux de tournage. Mais avec le changement de situation à la tête de la France, il n’est plus nécessaire ni pour l’une, ni pour l’autre de se cacher. Si Marianne est en train de se lancer dans l’écriture d’un nouveau roman, Hilda quant à elle s’apprête à relancer sa carrière en tournant ( et couchant) avec Romain, un cinéaste indépendant en vogue, dans un film sur les violences conjugales, adaptation d’un précédent roman de Marianne ! Et lorsqu’on apprend qu’il est possible que le film soit sélectionné à Cannes, on comprend que plus rien n’est de nature à constituer un obstacle pour l’actrice, ni pour son réalisateur…

Ainsi, tour à tour, on suit les réflexions, constatations et analyses de tous les protagonistes de ce petit monde – complété par les enfants de Lehman, dont Léonie, sa féministe fille de 23 ans – constituant un divertissement hautement romanesque. SI le Président de son côté s’autoenregistre et a sombré dans l’alcoolisme, Hilda du sien attend le moment propice pour rompre et ne plus traîner ce «’boulet’ inutile, Marianne par ailleurs étant prête à renouer avec son ex-mari, alors que du côté des plateaux de tournage Romain, le metteur en scène qui pourtant adapte à l’écran un roman dénonçant les violences faites aux femmes s’avère être un tyran en la matière.

Il y a un peu trop de tout dans ce roman certes pas désagréable à lire, mais comme on ne va pas très loin en termes d’approfondissement , on finit par avoir le sentiment que tout déborde un peu. On parle du vide existentiel de l’après-pouvoir, la condition féminine post MeToo, l’addiction à l’alcool et de façon générale les jeux de pouvoir dans la politique, le monde de l’édition, du cinéma et les rapports homme-femme, l’impact et la puissance des réseaux sociaux. Tout cela est évoqué à travers les jeux de l’amour et de la séduction, rendus via des dialogues manquant de naturel et de spontanéité. Je n’ai pas ressenti la moindre empathie non plus vis-à-vis des personnages du roman, même s’il est clair que des allusions font penser à des personnages ayant vraiment existé…

Même si j’ai eu envie de savoir comment tout cela allait se terminer, ce dernier roman de Karine Tuil m’a légèrement déçu, tant on regrette qu’il se contente d’enfoncer pas mal de portes ouvertes.